カラオケ (Karaoke)

Publié le par Kriek

Ha, quelle belle invention tout de même le karaoke.

 

Alors oui, je sais bien qu'en France, quand on pense à "karaoke", on voit des scènes un peu beauf, de soirées au centre de vacances ou de camping, avec plein de gros gens en short à fleurs qui chantent du Claude François et du Dalida en tapant dans les mains.

J'en ai vécu aussi.

 

Mais au Japon, la chose est bien différente.

 

Tout d'abord, le karaoke ne se pratique pas en salle des fêtes devant une assemblée de Club Med, mais dans des petits salons privatifs. On commence par se rendre dans l'établissement susdit , où se trouvent généralement ces salons privés, d'une taille variable allant de la cabine où l'on touche les 4 murs en restant assis, à un vrai lounge d'une dizaine de m² lorsqu'on y va à beaucoup. Les établissements peuvent être très familiaux comme être de véritables usines.

 

Là, on trouve généralement une grande télé, avec un appareil ressemblant à un magnétoscope mais avec des bitoniots et des chiffres de toutes les couleurs tout partout. Au milieu, une table avec des micros (généralement deux), réglés avec une grosse réverbération, et une pile de gros catalogues épais comme le bras, contenant toutes les chansons avec un code qui correspond à chacune.

 

Méthode bien rebutante qui oblige à éplucher tout le catalogue avant de trouver sa chanson, puis à recopier péniblement son code sur la télécommande pour envoyer la musique. Dans les établissements plus modernes, on a une tablette tactile sur laquelle rechercher son morceau et le commander, quoique le plus souvent l'outil soit passé entre tellement de mains qu'il est en fort mauvais état et que finalement, on se dit que les catalogues, c'est pas si mal.

 

Après, on chante, ou du moins, on essaye, sur le morceau reproduit de façon plus ou moins heureuse au synthétiseur. On peut y aller large sur les excès de voix, tout est insonorisé à l'extrême.

 

Pour ceux qui ne peuvent / veulent pas chanter en japonais, les machines sont dotées d'un très solide catalogue en variété internationale anglophone, qui permet presque toujours de trouver ce qu'on cherche. Tout est impeccablement mis à jour, avec les dernières sorties disponibles. Pour ce qui est du catalogue japonais, très fourni s'il en est, il contient une proportion non négligeable de génériques de dessins animés, de séries diverses, et aussi d'enka, chants traditionnels aux paroles très terroir et généralement pas très rigolotes (emmène-moi en enfer mon amour, noie-moi, arrache-moi les ongles, etc.), bourrées de voix aux gros trémolos et de solos de saxophone larmoyants.

 

Pas trop d'autres langues en revanche, à part les catalogues chinois et coréen qui sont bien remplis eux aussi. Il y a bien deux ou trois titres en français (généralement Edith Piaf ou France Gall), en allemand (Rammstein) ou en roumain (O-Zone) pour les plus courageux, mais ça reste plus du domaine de la curiosité. 

 

 

Mais un trait culturel capital baigne toute l'ambiance de ces lieux : c'est qu'ils sont généralement faits pour les salary-men, ces gens en costume-cravate toute l'année, qui travaillent comme responsable ou sous-responsable de machin-truc (on ne comprend jamais très bien ce qu'ils font vraiment), dans un bureau avec de la moquette bleue, ou verte pour les plus chanceux. Vous savez, ceux qu'une certaine Edith Cresson a comparé il y a quelques temps - avec toute la finesse et la diplomatie qu'on lui connaît - à ces fameux hyménoptères qui bossent tout le temps. (1)

 

Ceux-ci déboulent en masse (surtout le vendredi soir), accompagnés de leur patron, ou le week-end avec leurs collègues / copains, et se mettent une musette de façon pratiquement immanquable.

 

De ce fait, on ne s'étonnera pas de voir que les tarifs pratiqués varient très fortement : d'un prix ridicule en journée (55¥ / 0,96€ par heure et par personne), on passe à des tarifs astronomiques le soir, et tout particulièrement le week-end (1280¥ / 11,26€ de l'heure !!!) (2). C'est ce que j'appelle le tarif "spécial viande saoûle", auquel il faut rajouter, dans pas mal d'établissements, une consommation obligatoire, le plus souvent de la bière (500¥ la pinte).

 

On trouve quelques forfaits permettant de se péter la voix à volonté, voire (surtout dans les grandes villes) une formule de nuit, généralement de 23h à 6h, avec chant et binouze à volonté pour un prix très raisonnable par personne (15 à 30 €), pour ceux qui ont raté le dernier train et rêvent de se prendre la cuite du siècle.

 

Et j'ai l'impression que les candidats sont nombreux au Japon.

 

 

(1) Elle a figuré en bonne place au top 10 des portraits les plus brûlés au Japon en 1990.

(2) Tarifs de la marque Karaoke-kan dans le centre de Tôkyô. Mais ce n'est pas toujours moins cher ailleurs.

Publié dans Vie japonaise

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S
<br /> mdr la video c'est toi qui chante?!! lol<br /> <br /> <br />
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K
<br /> <br /> On m'a un peu aidé, mais faut pas avoir mal aux oreilles quand on m'amène au karaoke, généralement.<br /> <br /> <br /> <br />
S
<br /> "emmène-moi en enfer mon amour, noie-moi, arrache-moi les ongles"<br /> <br /> ca rappelle des souvenirs :o<br /> <br /> <br />
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K
<br /> <br /> Bah oui, c'est bien parce qu'on a étudié ses chansons que j'ai tendance à prendre Ishikawa Sayuri en exemple <br /> <br /> <br /> <br />